Posté le 22 octobre. 2022, 13:14

Giancarlo Giorgetti, choisi par défaut, est le meilleur choix que Giorgia Meloni pourrait faire pour rassurer les marchés financiers et la Commission européenne. Le nouveau président du Conseil aurait préféré un technocrate. Fabio Panetta, membre du directoire de la BCE, a décliné l’offre, tout comme le ministre sortant de l’Economie, Daniele Franco, qui a refusé de rester. Il sera donc occupé par Giancarlo Giorgetti, ministre du Développement économique sous Mario Draghi, en signe de continuité avec l’exécutif précédent.

Un politicien expérimenté

Depuis plus d’une décennie, le portefeuille de l’économie et des finances est en grande partie entre les mains d’un technocrate. Cette fois, il tombe sur un politicien chevronné. Né il y a 55 ans dans un village proche de la frontière suisse, Giancarlo Giorgetti a été réélu sans discontinuer depuis son arrivée au parlement en 1996. Ce comptable de formation, diplômé en économie commerciale, s’est engagé très tôt en politique. Militant, comme Giorgia Meloni, dans les rangs de la jeunesse du mouvement social italien post-fasciste, il a ensuite rejoint la Ligue du Nord, tout juste fondée à la fin des années 80. Il a été secrétaire général de la branche lombarde de 2002 à 2012.

Mais c’est à Rome que sa discrétion et ses qualités de médiateur sont appréciées. Après un bref passage dans le gouvernement de Silvio Berlusconi comme sous-secrétaire au ministère des Infrastructures et des Transports en 2001, il a pris deux fois la direction de la commission du budget de l’Assemblée nationale, de 2001 à 2006 et de 2008 à 2013.

Le visage modéré de la Ligue

Giancarlo Giorgetti est l’un des bras droits de Matteo Salvini. Tout sépare cependant les deux hommes, à commencer par leur caractère. Le dirigeant abusif et eurosceptique de la Ligue a choisi comme contrepoids ce conseiller très discret, voire bourru. Il est considéré comme l’un des représentants les plus modérés et pro-européens de son parti, connu pour sa capacité à réseauter dans les milieux d’affaires transalpins.

En 2011, alors que l’Italie était la cible de spéculations boursières, le gouverneur de la BCE, Mario Draghi, lui a demandé d’amener le Parlement à se concentrer sur l’austérité et à ajouter une exigence d’équilibre budgétaire à la constitution. La relation d’estime et de confiance qui se noue alors ne se démentira pas. Giancarlo Giorgetti est devenu ministre du Développement économique sous Mario Draghi et sera l’un de ses plus fervents partisans durant la crise qui a conduit à son renversement l’été dernier.

Un message de crédibilité

« Je ne sais pas si je pourrais devenir ministre de l’Economie », a-t-il déclaré alors que son nom commençait à circuler pour le poste. « Il sera très apte à cette tâche et il le fera très bien », a répondu son prédécesseur, Daniele Franco. Ses adversaires, en revanche, soulignent son manque de convictions solides, de compétences politiques plutôt qu’économiques, son manque de contacts dans le monde financier international et le fait qu’il parle un anglais médiocre.

Mais en choisissant Giancarlo Giorgetti, Giorgia Meloni envoie clairement le message de la crédibilité et du sérieux de son gouvernement, qui ne « tombera pas dans les folies budgétaires » comme elle l’avait promis lors de sa campagne électorale.

Une tâche ardue

La tâche s’annonce ardue pour ceux qui doivent s’atteler dès maintenant à la préparation du prochain budget. Il devra payer les factures avec une inflation record de 8,9% sur un an, l’explosion des factures énergétiques et une récession technique à partir de l’an prochain. Le tout avec une dette colossale représentant 150% du PIB. Giancarlo Giorgetti devra aussi freiner la volonté de son parti de faire exploser les déficits avec l’engagement de Matteo Salvini de débloquer 30 milliards d’euros pour soutenir les entreprises et les ménages, instaurer un « flat tax » de 15% et des préretraites pour alléger. Ses qualités de médiateur seront indispensables pour prouver à Giorgia Meloni que son choix a porté ses fruits.